Jean : « Quitter les ténèbres »

Je suis né en 1960. Quand je regarde en arrière, je me rends compte que je souffre d’anxiété depuis mes 20 ans, mais à l’époque c’était surtout épisodique et déclenché par des expériences négatives marquantes.
En 1999, mon anxiété est devenue constante en raison de problèmes professionnels et familiaux. Je suis allé voir mon médecin généraliste, qui m’a prescrit une dose quotidienne de 20mg Paroxétine. Au début, ça m’a aidé à faire face à la vie quotidienne.
Pendant toutes ces années, je n’ai pas consulté de thérapeute ni cherché d’aide non-médicamenteuse. J’ai continué à avoir des épisodes d’anxiété, mais je parvenais à les gérer.

En 2006, mon père est décédé et j’ai dû prendre la décision de le débrancher. Cette décision n’a pas été facile à prendre et m’a causé beaucoup d’angoisses. J’ai commencé à sombrer dans une anxiété constante, exacerbée par des sentiments de « catastrophe imminente », tant dans ma santé personnelle que dans ma vie professionnelle. Chaque malaise ou douleur devenait le signe d’une maladie mortelle, et chaque erreur que je commettais au travail me faisait craindre d’être licencié dès le lendemain.

J’ai commencé à voir un psychologue, mais ça ne m’a pas beaucoup aidé. En 2008, j’ai fini par rencontrer un psychothérapeute qui a réussi à m’accompagner et à me guider pour travailler sur mes sentiments de culpabilité concernant la mort de mon père. Ensemble, on a utilisé utilisé l’EMDR et la Thérapie Comportementale et Cognitive pour identifier la racine de mon anxiété et utiliser des outils comportementaux pour la gérer.
C’est à ce moment-là que j’ai vraiment commencé à développer mon approche de l’anxiété en tant que maladie chronique, mais gérable.

En 2006, constatant que l’antidépresseur ne diminuait plus du tout mon anxiété, j’ai essayé d’arrêter de le prendre. Mon médecin m’avait dit d’arrêter mon traitement, mais il ne m’avait pas donné de consignes spécifiques, et je me suis retrouvé à baisser ma dose beaucoup trop rapidement. Mon anxiété et mes pensées catastrophiques étaient hors de contrôle et j’ai dû reprendre la Paroxétine pour me stabiliser.

À la fin de 2006, j’ai découvert le forum « Paxilprogress » (ce site Internet n’existe plus aujourd’hui) et j’y ai découvert d’excellents conseils et du soutien pour apprendre à réduire ma dose progressivement.
J’ai commencé un sevrage très progressif en 2007, et j’ai pris ma dernière dose de Paroxétine en 2009. Ça n’a pas toujours été facile, et j’ai connu de nombreux revers, mais les membres de Paxilprogress et mon psychologue m’ont apporté un soutien considérable.
Pendant 18 mois environ après ma dernière dose de Paroxétine, j’ai vécu une progression graduelle, j’ai constaté des améliorations petit à petit, je réagissais de moins en moins souvent de façon anxieuse.

L’anxiété fait toujours partie de ma vie, mais elle ne me contrôle plus, ni moi ni les décisions que je prends. Je prends encore une faible dose de Clonazépam quand les émotions deviennent trop intenses, mais jamais plus d’une ou deux fois par mois. J’utilise toujours les outils de ma Thérapie Comportementale et Cognitive pour contrôler mes pensées catastrophiques :

– La confrontation avec la réalité : essayer d’observer la situation d’un point de vue extérieur. Mon « problème » ou ma « situation » est-il vraiment ce que j’en pense ? Les conséquences de mon anxiété sont-elles réalistes ou même probables ?

– Catastropher délibérément : pousser mes pensées négatives à l’extrême. À chaque étape du processus, les conséquences négatives sont devenues de plus en plus absurdes jusqu’à ce que même ma pire pensée catastrophique soit surmontée.

– Être mon propre meilleur ami. Si mon ami venait me voir avec les mêmes pensées, qu’est-ce que je lui dirais ? Puis j’applique ces réponses à ma situation.

– La prière et la méditation. Je ne suis pas une personne très contemplative, mais je parviens parfois à méditer. Parfois, j’écoute certains de mes morceaux de musique préféré jusqu’à ce que les pensées s’apaisent. Je me dis aussi : « Dans deux heures, je me sentirai mieux ou j’aurai même oublié ». La plupart du temps, cela fonctionne.

– Continuer à travailler pendant mon sevrage, malgré les symptômes : j’ai trouvé que le travail était une excellente thérapie. J’avais un poste de direction assez complexe qui exigeait toute mon attention. C’était aussi un environnement que je pouvais contrôler, dans une certaine mesure. Le travail m’a obligé à concentrer mon énergie mentale sur des problèmes réels et quantifiables ; je n’avais tout simplement pas de place pour me concentrer sur mes pensées anxieuses.

Mes conseils ?

Ne soyez pas trop dur avec vous-même. Même avec une diminution progressive, il m’est arrivé de remonter un peu ma dose durant mon sevrage, jusqu’à ce que je sois prêt à passer à l’étape suivante. Ce n’est pas une course : faites ce qui fonctionne pour vous.

Trouvez un thérapeute, ou au moins quelqu’un qui peut vous offrir du soutien et vous aider à rester ancré dans la réalité. Les médicaments seuls ne seront jamais la solution. Qu’il s’agisse de TCC ou d’autres outils, trouvez les pratiques comportementales qui fonctionnent pour vous.

Acceptez le fait que l’anxiété fasse partie de votre personnalité. Quelle qu’en soit la cause, l’anxiété m’accompagnera jusqu’à ma mort. J’ai appris à la gérer, et la plupart du temps elle n’est qu’un vague sentiment au fond de mon esprit. Ce que je comprends maintenant, c’est qu’elle n’a que le pouvoir que je lui donne. Elle ne contrôle plus mes actions ou mes décisions, et la thérapie m’a aidé à distinguer les pensées anxieuses irrationnelles des préoccupations et des problèmes réels.

En résumé, comme pour toute autre maladie chronique, il faut les bons outils, les bonnes personnes et de la détermination pour gérer l’anxiété et la ramener à ce qu’elle est : un sentiment inconfortable, et non pas le monstre auquel notre esprit voudrait nous faire croire.

S’il y a bien une chose que j’ai appris sur mon chemin, c’est qu’il est nécessaire de se pencher sur les raisons qui vous ont poussé à prendre des médicaments au départ. Je ne suis pas « anti-médicaments », mais les médicaments ne sont pas un outil de guérison ; il s’agit au mieux d’un outil d’atténuation temporaire des symptômes qui ne s’attaque en rien aux causes profondes de l’anxiété, des TOC et/ou de la dépression.

La thérapie par la parole m’a aidé à gérer mon sevrage, mais surtout, elle m’a fourni l’outil à long terme dont j’avais besoin pour reconnaître les pensées irrationnelles et obsessionnelles que je subissais. Pour paraphraser un vieux proverbe chinois, il faut nommer son démon pour le maîtriser. J’ai découvert qu’il me fallait une combinaison d’outils de TCC et de séances de thérapie régulières pour arriver à gérer mes pensées de façon rationnelle. Différentes choses peuvent fonctionner pour différentes personnes.
La bonne nouvelle, c’est qu’il n’y a pas une seule voie correcte ; vous pouvez choisir ce qui vous convient le mieux et expérimenter jusqu’à ce que vous trouviez ce qui fonctionne le mieux pour vous.


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